Bayonne. Des employés des Ehpad Goxoki et Argia expriment leur épuisement face à un manque de personnel

À Bayonne, l’inquiétude grandit dans les couloirs des Ehpad Goxoki et Argia, où une trentaine d’employés tirent la sonnette d’alarme. Entre fatigue chronique et sentiment d’abandon, ces professionnels des soins gériatriques dénoncent un sous-effectif endémique et un manque criant de moyens. Sur le terrain, familles et résidents observent les conséquences concrètes de ce déficit de personnel : les rythmes de vie sont bousculés, la qualité des services à la personne s’effrite, tandis que le bien-être des employés s’érode jour après jour. Ce malaise, encore exacerbé par des difficultés de recrutement généralisées, révèle une crise plus large touchant la santé publique et la prise en charge des aînés en France. Alors que la solidarité intergénérationnelle et le soutien aux aidants sont plus que jamais nécessaires, Bayonne devient le témoin d’une bataille pour retrouver de l’équilibre au sein de ses établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Manque de personnel dans les Ehpad de Bayonne : une alerte pour le secteur des soins gériatriques

Dans les Ehpad Goxoki et Argia, situés à Bayonne, la question du sous-effectif est devenue un sujet de préoccupation majeure pour toutes les parties prenantes. Ce phénomène ne se limite pas à quelques absences passagères : il s’inscrit dans une réalité structurelle qui fragilise au quotidien la qualité des soins dispensés aux personnes âgées.

Le 31 juillet, une trentaine de salariées représentatives de l’ensemble des métiers des Ehpad Goxoki et Ehpad Argia a pris la parole devant les établissements pour dénoncer la persistance du non-remplacement des arrêts maladie et l’impossibilité d’assurer toutes les missions de façon optimale. La mobilisation avait pour but de mettre en lumière plusieurs faits préoccupants, notamment la nécessité de partager entre établissements une unique infirmière ou les situations où l’absence d’une aide-soignante ou d’un agent des services hospitaliers (ASH) désorganise totalement la répartition des tâches.

L’infirmière Maider Erramouspe, engagée à Argia, illustre cette crise : dans certains cas, une seule soignante doit s’occuper de 17 résidents dépendants, alors que chaque patient demande une vigilance constante – certains présentant des troubles du comportement complexes qui requièrent patience et énergie. Les conséquences ne se limitent pas aux soins techniques : elles touchent également le moral des équipes, plongées dans un épuisement physique et psychologique profond.

• Augmentation du temps passé auprès de chaque résident, sans possibilité de prendre le moindre repos.
• Réorganisation constante des emplois du temps, générant du stress et des frustrations.
• Sacrifice des moments d’écoute et de soutien, pourtant essentiels dans le secteur gériatrique.
• Difficultés accrues pour assurer les soins d’hygiène et d’accompagnement quotidien.
• Impact direct sur la santé mentale des soignants et agents de service.

Cette alerte, partagée par la secrétaire générale CGT Marie-Pierre Etchebarne, dépasse largement le cadre bayonnais. Elle trouve écho à travers la France, comme en témoignent les reportages et analyses sur le sujet : l’Yonne en crise ou encore les situations similaires observées chez différents gestionnaires d’Ehpad.

Les familles, comme Jean-Luc Dejoie venu visiter sa mère, sont les premiers témoins de ce déséquilibre. Il n’est pas rare que certains résidents soient mis au lit dès 16 heures faute de bras ou, plus grave encore, qu’ils restent alités toute une journée par manque de personnel disponible. Une situation qu’il juge « inacceptable ». Face à ces réalités, la pression monte sur la direction des établissements et les autorités locales, qui doivent composer avec un contexte économique tendu et des difficultés de recrutement propres à la filière gériatrique.

L’enjeu de la santé publique au sein des Ehpad

Ce mal-être latent parmi les professionnels des Ehpad interroge sur les responsabilités des acteurs de la santé publique : comment garantir la sécurité et la dignité de nos aînés quand l’épuisement des équipes mine la continuité des soins ? C’est aussi l’ensemble du modèle français de prise en charge de la dépendance qui se voit remis en question, appelant à des réponses innovantes autant qu’à une mobilisation sociale accrue.

Alors que d’autres territoires expérimentent de nouvelles formes de soutien aux aidants, comme les séjours temporaires en Ehpad, la situation à Bayonne sonne comme un rappel : le secteur des soins gériatriques a besoin de renfort, de reconnaissance et d’accompagnement pour éviter l’épuisement généralisé et préserver la solidarité intergénérationnelle.

• Renforcement nécessaire des effectifs
• Meilleurs dispositifs de remplacement
• Stratégies pour revaloriser ces métiers

Épuisement professionnel des salariés et retombées sur la qualité de vie des résidents

La fatigue n’est pas qu’un ressenti personnel : elle se traduit chaque jour dans la qualité de vie des résidents des Ehpad Goxoki et Argia. L’épuisement des équipes soignantes et administratives crée une ambiance lourde, où la bienveillance laisse parfois la place à la précipitation et au découragement. Les chiffres nationaux confirment un taux d’absentéisme en hausse, aggravé par une pénurie de remplaçants et un turnover incessant.

Pour illustrer cette réalité, prenons le cas de Nicole Fourmeaux, aide-soignante à Argia. Elle doit gérer, avec ses collègues, des tâches qui en temps normal incombent à une équipe renforcée. Entre le lever, la toilette, les repas et l’accompagnement psychologique, la charge devient accablante. Lorsque l’infirmière, partagée entre deux établissements, vient en renfort, on mesure le poids des absences sur le bon fonctionnement global.

• Temps réduit consacré à chaque résident
• Décalage dans la programmation des soins
• Moins de disponibilité pour répondre aux signaux faibles de détresse
• Abrègement forcé d’activités collectives ou de stimulation cognitive
• Gestion complexe des situations d’urgence comportementale ou médicale

Ces situations, si elles perdurent, risquent de fragiliser le lien fondamental entre soignants et résidents. Dans certains cas, elles peuvent même mettre en danger les personnes âgées les plus vulnérables. Un phénomène déjà observé dans d’autres EHPAD et rapporté par la presse nationale lorsqu’un manque de personnel aboutit à des drames évitables.

Une redéfinition nécessaire des services à la personne

Le secteur des services à la personne, en pleine mutation, doit donc s’interroger sur la façon de retrouver de l’équilibre et de garantir le bien-être des employés tout en assurant une prise en charge digne pour chaque résident. Plusieurs solutions ont été avancées, telles que la retraite progressive pour les salariés épuisés, ou encore la création de cellules de soutien psychologique après des événements traumatisants, à l’exemple d’initiatives menées dans d’autres régions.

À Bayonne, ces questions prennent un relief tout particulier, alors que familles et proches s’adressent régulièrement aux directions pour demander des explications, mais aussi des garanties quant à la continuité d’une prise en charge respectueuse.

• Dispositifs d’écoute et d’accompagnement du personnel
• Valorisation financière et symbolique des équipes
• Renforcement des liens avec les familles et les bénévoles
• Insertion de mesures innovantes pour l’organisation du travail

Un nouvel équilibre doit impérativement être trouvé pour prévenir la spirale de la maltraitance institutionnelle et protéger la santé publique dans son ensemble.

Les effets du sous-effectif sur la relation soignant-résident : témoignages et solutions locales

La relation de confiance entre soignant et résident constitue un pilier du bien vieillir en Ehpad. Toutefois, la situation à Bayonne met en lumière la fragilité de ce lien dès lors que le manque de personnel modifie les rythmes et l’ambiance quotidienne. Au fil des heures, la fatigue accumulée transforme la qualité de l’interaction.

Pour Jean-Luc Dejoie, qui vient voir sa mère à Goxoki deux fois par semaine, la détérioration du service est palpable. Lorsque sa mère est au lit dès 16h ou passe toute une journée sans sortir, l’inquiétude s’invite à chaque visite. Ces bouleversements, imputables à une gestion en flux tendu, ont d’ailleurs un effet domino sur la confiance des familles et la stabilité des résidents.

• Augmentation du nombre de plaintes des familles
• Retrait social des résidents plus fragilisés
• Baisse de la qualité de la communication soignant-résident
• Diminution de l’implication dans la vie collective de l’établissement
• Incompréhension grandissante entre directions et équipes de terrain

Face à ce constat, des initiatives locales émergent pour renforcer le soutien aux aidants et améliorer les conditions de travail, comme en témoignent les expérimentations menées ailleurs : séjours temporaires pour soutenir les aidants ou organisation d’ateliers innovants pour booster le moral du personnel (découvrez des exemples ici).

Bien-être au travail et solidarité intergénérationnelle : des pistes à explorer

Ainsi, pour préserver le bien-être des employés et tisser un climat de confiance, divers leviers sont accessibles :

• Mise en place de groupes de paroles pour les soins gériatriques
• Renforcement de la solidarité intergénérationnelle via des partenariats externes
• Ouverture de plages horaires pour les bénévoles et proches
• Création de binômes « jeunes retraités – soignants » pour soutenir les équipes

Il s’agit là de démarches susceptibles de restaurer un équilibre précieux et de prévenir l’isolement professionnel des soignants. Ces mesures demandent néanmoins l’engagement de chaque acteur : directions, pouvoirs publics, familles et bien entendu, les collectivités locales de Bayonne.

Des enjeux de santé publique et d’équilibre sociétal autour des Ehpad

La crise qui frappe les Ehpad Goxoki et Argia dépasse le strict cadre de la gestion du personnel et interroge en profondeur le rapport de la société à la dépendance et au bien-être des aînés. À Bayonne comme ailleurs, ce sont des questions d’éthique, de santé publique et de solidarité. Les difficultés rencontrées aujourd’hui par les professionnels de l’accompagnement des seniors posent des défis collectifs.

L’accès à des soins gériatriques de qualité suppose une société capable de reconnaître la valeur du travail accompli par les soignants et de leur offrir les moyens d’assurer leurs missions. Or, comme le rappelle la direction du Centre Hospitalier de Bayonne, la gériatrie reste un secteur en tension constante, dont le recrutement est de plus en plus ardu malgré les promesses d’investissement et de réforme. Le plan d’économies élaboré pour résorber le déficit ne doit pas s’effectuer au détriment de la qualité des services à la personne.

• Besoin de politiques publiques fortes pour attirer et fidéliser les professionnels
• Nécessité de repenser l’articulation entre établissements et soins à domicile
• Développement de l’action sociale pour le soutien aux aidants familiaux
• Pilotage agile des ressources humaines dans les structures d’accueil

L’expérience d’autres établissements montre que des réponses existent : séjours temporaires pour offrir du répit (exemple à Clermont-Ferrand), valorisation du rôle refuge des maisons de repos (ici) ou accompagnement psychologique renforcé lors d’événements difficiles (lire le reportage).

Quel modèle pour demain ? La force de l’innovation et de la proximité

En s’appuyant sur des initiatives locales et la capacité de mobilisation des équipes, des pistes émergent :

• Renouveler l’accompagnement des résidents à travers des ateliers participatifs
• Susciter l’engagement associatif aux côtés des professionnels
• Ouvrir davantage les établissements à la société civile et au tissu local
• Expérimenter des formules innovantes comme les séjours à thème ou à visée thérapeutique

Cette adaptation permanente peut ainsi permettre, à l’échelle de Bayonne et du bassin basque, de restaurer la solidarité intergénérationnelle tout en répondant aux attentes spécifiques des aînés et de leurs proches. C’est aussi l’opportunité de réinventer le statut même du métier d’accompagnant gériatrique, élément clé du bien-vieillir en société.

Des pistes concrètes pour retrouver de l’équilibre dans les Ehpad de Bayonne

Assurer un équilibre durable dans les Ehpad Goxoki et Argia implique d’agir sur différents leviers. Si l’épuisement professionnel menace la santé des employés et la qualité de l’accompagnement, il existe néanmoins des solutions éprouvées ou à inventer pour restaurer un climat serein au sein des établissements de Bayonne.

La participation des familles, la valorisation du travail des soignants, et la mise en synergie avec des partenaires du territoire sont autant de pistes pour réenchanter le quotidien et faire de chaque Ehpad un véritable espace de vie. Pour s’en inspirer, on peut consulter le panorama des pratiques de gestion du sous-effectif ou les initiatives solidaires recensées en France.

• Développement de l’accueil temporaire des seniors pour soulager les équipes
• Partenariats avec des structures de formation pour favoriser le tutorat et le renouvellement des effectifs
• Mise en place de dispositifs de prévention du burn-out
• Souplesse organisationnelle pour ajuster en temps réel les moyens aux besoins
• Incitation à la co-construction avec les résidents et leurs proches

L’écoute, la prise en compte des signaux faibles et une communication transparente avec tous les acteurs – agents, familles, institutions – sont essentielles pour régénérer la confiance. Les Ehpad de Bayonne, en affrontant avec courage cette période difficile, restent un laboratoire où s’inventent les solutions du bien-vieillir de demain.